Voici une petite histoire de Bruno Ferrero en rapport à la fête de Pâques. Malgré le virus et le confinement, qui fait dire à certains que « tout est mort » comparé aux nombreuses activités et célébrations qui caractérisent habituellement cette semaine pascale, les apparences peuvent être trompeuses…
Une petite chenille
Il était une fois une petite chenille qui rampait résolument avec toute la force de ses petits pieds en direction du soleil. Une sauterelle la vit et, curieuse comme elle est, lui demanda : « Où vas-tu ? »
Sans ralentir le pas, la chenille répondit : « J’ai fait un rêve cette nuit. Je me trouvais au sommet de cette montagne et je pouvais admirer toute la vallée. J’ai beaucoup aimé ce que j’ai vu et j’ai décidé de le réaliser. »
« As-tu perdu la tête ? Comment peux-tu penser arriver là-haut ? Pour toi, un caillou est déjà une montagne énorme, une flaque est un océan et une branche est une barrière infranchissable ! »
La petite chenille ne l’écoutait pas du tout, mais se tortillant et rampant, elle continuait à avancer.
Un coléoptère à l’armure noire et brillante la vit et lui dit : « Où vas-tu si pressée, la chenille ? »
Essoufflée par l’effort, la chenille répondit : « J’ai fait un rêve et je veux le réaliser. Je vais monter sur cette montagne pour regarder notre monde depuis là-haut. »
Le coléoptère éclata de rire.
Tous ceux qui la rencontraient, les araignées, les taupes, les grenouilles, les fleurs, même une souris, ne faisaient que de répéter la même ritournelle : « Laisse tomber ! Tu n’y arriveras jamais ! »
Mais la chenille continuait.
Ses forces diminuaient jusqu’à ce qu’elle soit épuisée. Elle s’arrêta pour se reposer, mais d’abord elle se construit un refuge pour passer la nuit. Une sorte de sac de couchage robuste, dans lequel elle s’enveloppa complètement.
Tous les petits animaux de la forêt se rassemblèrent pour regarder la tombe de celle qu’ils considéraient comme l’animal le plus stupide du monde, morte de fatigue pour réaliser un rêve téméraire.
Un matin, alors que le soleil brillait d’une manière particulière, ils se réunirent nombreux autour de la tombe de la chenille, devenue un monument à la folie, un avertissement pour les fous qui se lanceraient dans des entreprises impossibles. Tout d’un coup, ils se rendirent compte que cette coquille compacte se déchirait et qu’il en émergeait deux antennes et puis, tout doucement, deux magnifiques ailes iridescentes attachées au petit corps d’un papillon qui se libéra et déploya ses ailes, les montrant dans toute leur splendeur.
Tous les petits animaux restèrent silencieux, confus. Ils avaient eu tort et ils se sentaient très bêtes.
La chenille était en train de réaliser facilement le rêve pour lequel elle avait vécu, était morte et était revenue pour vivre : arriver au sommet de la montagne.
Source: “Un piccolo bruco”, in La vita secondo l’aurora, dans la série “Piccole storie per l’anima” de Bruno Ferrero, 2014, éd. Elledici, Torino, p. 20s. Traduction libre par Jeff Berkheiser.
Et Bruno Ferrero relie cette histoire aux vœux attribués à Jacques Brel sur « Europe 1 », le 1er janvier 1968 :
Je vous souhaite des rêves à n’en plus finir,
et l’envie furieuse d’en réaliser quelques-uns.
Je vous souhaite d’aimer ce qu’il faut aimer,
et d’oublier ce qu’il faut oublier.
Je vous souhaite des passions.
Je vous souhaite des silences,
je vous souhaite des chants d’oiseaux au réveil et des rires d’enfants…
Je vous souhaite de résister à l’enlisement, à l’indifférence,
aux vertus négatives de notre époque…
Je vous souhaite surtout d’être vous.
Jeff Berkheiser, pasteur