Voici une autre petite histoire de Bruno Ferrero, qui doit dater d’une autre époque, avant le COVID-19, quand le mouchoir en tissu était encore utilisé… Mais le confinement de nos jours pourrait aussi donner lieu à des discussions comme celle-ci, au sein d’un couple obligé de rester à la maison…
Georges et moi étions au milieu d’une discussion animée quand il s’arrêta un instant, tira de la poche arrière de son pantalon un mouchoir blanc sans broderie. Il l’ouvrit et se moucha fortement dedans. Je continuai à parler, sans autre.
Après quelques vigoureux soufflements, il replia le mouchoir soigneusement selon les plis originaux, le mit dans sa main droite et le renfila dans la poche du pantalon.
Quand il leva les yeux de nouveau vers moi, j’étais sans voix. Je restais la bouche ouverte. Je ne croyais pas mes yeux, et l’expression sur mon visage en témoignait.
« Quelque chose ne va pas ? »
« Tu plies toujours ce mouchoir de cette façon après t’être mouché le nez ? »
« Oui, quel est le problème ? »
« Eh ben, c’est que je suis mariée avec toi depuis vingt-cinq ans mais je n’ai jamais su que tu repliais comme ça le mouchoir après t’être mouché. »
« Et alors ? »
« Et alors, je suis désolée de te dire que quand je fais la lessive et je trouve ton mouchoir si bien plié dans la poche de ton pantalon, je présume que tu ne l’as pas utilisé et je le remets dans le tiroir sans le laver… »
Maintenant, c’est à Georges de rester la bouche ouverte.
Quelques minutes plus tard, il s’exclama, « Maintenant je comprends pourquoi j’ai tant de peine à nettoyer mes lunettes ! »
Source: “Il dialogo”, in La vita secondo l’aurora, dans la série “Piccole storie per l’anima” de Bruno Ferrero, 2014, éd. Elledici, Torino, p. 36. Traduction libre par Jeff Berkheiser.